La parution du texte d’opinion de Mme Helen Wallace semble intentionnellement coïncider avec la décision de l’UE d’exiger des États membres qu’ils démontrent les progrès réalisés dans la mise en oeuvre des dépôts géologiques. Le texte conteste les décisions politiques prises par plusieurs pays de procéder à la construction de dépôts géologiques destinés à la gestion sûre à long terme de leur combustible nucléaire irradié.
À l’instar de la Suède, de la France, de la Finlande, du Royaume-Uni et d’autres pays, le Canada a adopté un plan visant à confiner et à isoler son combustible nucléaire irradié à l’intérieur d’un dépôt géologique en profondeur. Appelée la Gestion adaptative progressive, cette approche émane de décennies de recherche technique, des conclusions de nombreuses études scientifiques internationales et canadiennes ainsi que de trois années de consultation de milliers de citoyens, de spécialistes et de membres des peuples autochtones de l’ensemble des provinces et territoires du pays. La mise en oeuvre du plan canadien a été confiée à la Société de gestion des déchets nucléaires.
La sûreté
Des dépôts géologiques ont été construits et sont exploités à travers le monde pour divers types de déchets radioactifs. Un dépôt géologique en profondeur de combustible nucléaire irradié est en cours de construction en Finlande et la construction de dépôts similaires pour la gestion du combustible irradié et de déchets hautement radioactifs est actuellement prévue en Suède, au Royaume-Uni et en France.
L’approche du stockage géologique est l’aboutissement de plus de 30 années de recherche, de développement et de démonstration technologiques et techniques. Les concepts et dossiers de sûreté ont fait l’objet d’examens par des pairs et d’évaluations environnementales. Au Canada, par exemple, une évaluation environnementale de 10 années a déterminé que le concept de dépôt géologique proposé était sûr sur le plan technique.
Comme le décrivent maintes études, la sûreté des dépôts géologiques en profondeur s’appuie sur un système à barrières multiples. Le combustible irradié se présente sous la forme de pastilles de céramique scellées dans des tubes de zircalloy résistants à la corrosion. La radioactivité est emprisonnée dans ces pastilles. Celles-ci constituent la première barrière contre les rejets, la seconde étant les tubes résistants à la corrosion. Le combustible irradié est de plus confiné dans des conteneurs en acier ou en cuivre résistants à la corrosion. Une fois stockés dans le dépôt, ces conteneurs sont ensuite enfermés sous une couche de matière argileuse. La cinquième et dernière barrière est la géosphère elle-même. Le dépôt canadien, par exemple, sera construit à une profondeur approximative de 500 mètres, au sein d’une formation géologique appropriée.
Un des fondements du plan canadien est l’incorporation de nouvelles connaissances à chaque étape pour orienter le processus décisionnel progressif. Le plan est suffisamment souple pour pouvoir être adapté au besoin. Par exemple, il prévoit une étape facultative d’entreposage à faible profondeur sur le site du dépôt pour parer aux imprévus. Cette étape pourrait être utile s’il devenait nécessaire de retirer le combustible irradié d’une ou de plusieurs installations actuelles d’entreposage provisoire avant que le dépôt ne soit prêt à l’accueillir.
Le combustible irradié sera surveillé à toutes les phases de mise en oeuvre de l’approche de la Gestion adaptative progressive. Il pourra de plus être récupéré en tout temps. Les galeries et puits d’accès ne seront remblayés et scellés qu’au moment jugé opportun par la collectivité, la SGDN et les autorités de réglementation, après quoi la phase de surveillance post-fermeture commencera.
Les études scientifiques
De nombreuses études réalisées par un large éventail de scientifiques dans le monde ont examiné tous les mécanismes imaginables de défaillance du système de stockage, y compris la corrosion, la génération de chaleur, l’accumulation de gaz, l’apparition éventuelle de fractures et failles géologiques, les dommages liés aux travaux d’excavation, les tremblements de terre et les incidences possibles des futures périodes glaciaires.
Les conclusions de ces études techniques ont été validées par de multiples examens de pairs et ont fait l’objet de plusieurs études comparatives. L’AEN fournit des examens par des pairs dans le cadre de son mandat d’aider à améliorer et à harmoniser les fondements techniques de la gestion des déchets nucléaires produits par ses pays membres. L’AIEA mène des examens par des pairs dans le cadre de son mandat, qui est entre autres de fournir des services utiles à la recherche-développement sur l’énergie nucléaire et à son application pratique à des fins pacifiques ainsi que d’établir des normes de sûreté internationales et de promouvoir leur application.
La sûreté du concept de dépôt est également confirmée par des analogues naturels, c’est-à-dire des occurrences naturelles où des matières radioactives ont été emprisonnées dans des formations géologiques pendant des centaines de millions d’années. Un analogue de la sorte se trouve à Cigar Lake, en Saskatchewan, où rien ne témoigne du fait qu’un gisement d’uranium à haute teneur y est isolé par de l’argile à 430 mètres de profondeur depuis plus de 1,3 milliard d’années. Les modèles numériques confirment également la sûreté de ces projets. Selon le consensus scientifique issu de l’ensemble des recherches menées à ce sujet, les dépôts géologiques en profondeur sont sûrs.
Examen réglementaire
Avant qu’un projet de dépôt puisse être mis en oeuvre au Canada, il devra faire l’objet d’un processus d’examen réglementaire rigoureux et exhaustif. Le site choisi reposera sur une formation rocheuse dont les caractéristiques géologiques, hydrogéologiques, chimiques et mécaniques permettront de confiner le combustible au sein d’un dépôt qui satisfait aux exigences de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN), ou les dépasse, respecte les directives de l’AIEA et est basé sur l’expérience acquise dans d’autres pays dotés d’un programme de gestion des déchets nucléaires.
Une évaluation environnementale sera exigée en vertu de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. La sûreté devra être démontrée de manière satisfaisante à la CCSN, laquelle est responsable de la délivrance des permis pour toutes les phases de préparation du site, de construction, d’exploitation, de déclassement et de fermeture du projet. D’autres lois et règlements s’appliqueront en outre, dont la réglementation de Transports Canada et les réglementations des autorités provinciales et municipales compétentes.
Façonner l’avenir ensemble
La Gestion adaptative progressive est basée sur un processus décisionnel progressif apte à s’adapter à l’évolution des priorités sociétales et à tirer profit des meilleures innovations technologiques. La SGDN s’est engagée à mettre en oeuvre le plan en collaboration avec les Canadiens intéressés et touchés, appliquant les résultats des recherches scientifiques et sociales canadiennes et internationales les plus avancées.
L’aptitude de tout site choisi pour accueillir l’installation à confiner et à isoler le combustible nucléaire irradié en toute sûreté pour une très longue période devra être démontrée. Tout site choisi devra aussi répondre à des critères scientifiques et techniques qui tiendront compte du principe de précaution et qui assureront la protection de la génération actuelle et des générations futures.
Les Canadiens ont clairement affirmé que notre génération devait assumer dès maintenant la responsabilité du combustible nucléaire irradié qu’elle a produit et qu’elle ne devait pas léguer ce fardeau aux générations futures. Ces mêmes Canadiens ont dit à la SGDN que l’approche de la Gestion adaptative progressive était celle qui correspondait le mieux aux valeurs et aux objectifs qu’ils jugeaient prioritaires concernant la gestion à long terme du combustible nucléaire irradié, soit la sûreté, la sécurité et la souplesse avec laquelle le plan est mis en oeuvre.